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À la découverte des SPOT, lieux communautaires de prévention et de santé sexuelle pour lutter contre le VIH/sida

Depuis 36 ans, l’association AIDES lutte pour réduire les nouvelles contaminations et accompagner les personnes touchées par le VIH/sida. En 2016, elle a créé LE SPOT, structure pionnière de prévention et de santé sexuelle qui emprunte au concept des centres communautaires anglo-saxons ayant déjà fait leurs preuves en la matière, à San Francisco ou Londres.

D’abord mis en œuvre à Paris et Marseille, puis à Nice et bientôt à Montpellier, les SPOT ne sont pas implantés au hasard : ils visent les régions les plus touchées par l’épidémie de VIH en France métropolitaine. L’objectif est simple : répondre aux besoins des populations les plus exposées au VIH, aux hépatites virales et plus largement aux infections sexuellement transmissibles (IST). Les SPOT s’adressent ainsi en particulier aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, aux personnes trans et aux travailleuses et travailleurs du sexe.

Les SPOT ont été aménagés pour offrir un environnement chaleureux et accueillant, propice à l’accompagnement de pair à pair.

Ceux qui poussent la porte d’un SPOT y trouvent un lieu chaleureux, accueillant, proposant une offre globale en prévention et en santé sexuelle : dépistage du VIH et des IST, préservatifs, traitement préventif et traitement d’urgence contre le VIH/Sida, vaccination contre les hépatites A et B, consultations spécialisées avec des professionnels expérimentés (infectiologues, proctologues, addictologues, psychologues, sexologues). Ils y trouvent surtout ce qui fait défaut dans un lieu de soin classique : l’accueil par des salariés ou bénévoles de l’association qui connaissent et comprennent leurs problématiques et leur mode de vie pour les avoir parfois connues eux-mêmes. Cela porte un nom : l’accompagnement communautaire, dans une approche de “pair à pair”.

Dès le premier contact, à l’accueil, la personne qui vient nous voir est en présence d’un pair. Ensuite seulement elle est dirigée vers le parcours de soin. Ce premier contact met en confiance.

Laurent Passalacqua volontaire

Au SPOT, on leur propose un endroit où ils et elles peuvent être entendus.

Cette relation de pair à pair est un ingrédient clé pour instaurer la confiance. Laurent Passalacqua, volontaire impliqué dans le projet d’ouverture d’un nouveau SPOT à Montpellier, explique : “Dès le premier contact, à l’accueil, la personne qui vient nous voir est en présence d’un pair. Ensuite seulement elle est dirigée vers le parcours de soin. Ce premier contact met en confiance. Par exemple, en Occitanie, il y a un gros besoin concernant l’accueil des publics trans. La plupart sont vulnérables, en transition, ont des parcours difficiles et les soignants sont souvent dans le jugement. Au SPOT, on leur proposera un endroit où ils et elles pourront être entendus et accompagnés.

Ce contact avec les pairs ne se limite d’ailleurs pas à l’accueil. Il est central dans l’accompagnement. Stéphan Vernhes, responsable du SPOT Paris-Beaumarchais, explique : “Les salariés ou volontaires recrutés ont des points communs avec les personnes qu’elles reçoivent et on les forme pour mener des entretiens individuels et animer des groupes de parole. Elles sont alors capables de faire de la médiation, conseiller et orienter les personnes reçues, leurs donner les outils pour prendre les bonnes décisions, c’est ce qu’on appelle l’« empowerment ».” Un exemple de problématique spécifique nécessitant cette approche communautaire : la consommation de produits psychoactifs et/ou stimulants dans un contexte sexuel, appelée “Chemsex”. “Depuis 10 ans, de nouvelles substances sont apparues, en vente sur internet, peu chères et très addictogènes. Beaucoup de garçons très seuls, en manque affectif et subissant l’homophobie, se sont mis à consommer et de plus en plus. Ils perdent petit à petit le lien social mais ils peuvent se tourner vers nous, où ils seront accueillis sans jugement par des pairs.

Il n’existe pas d’outil magique pour s’en sortir mais pour moi, le SPOT a fait partie d’une palette d’outils.

Cette démarche ne se substitue pas au suivi médical : “Quand on aborde certains sujets, il est plus facile de parler à un pair qu’à un psy. Et inversement. Nous sommes complémentaires.” Ce que confirme un bénéficiaire : “J’ai accepté un suivi avec un accompagnateur du SPOT. J’étais dans l’ambiguïté car je voulais bien admettre que j’avais un problème de drogue mais j’avais du mal à m’identifier comme toxicomane. Ce suivi m’a beaucoup aidé, en complément d’autres démarches comme le suivi avec un psychologue et les rendez-vous chez Narcotiques Anonymes. Mon accompagnateur connaissait la problématique de l’addiction et s’en était sorti. Avec lui, je n’ai jamais ressenti le besoin de masquer la réalité et j’avais moins cette crainte que la sincérité de ma démarche soit mise en doute. Même en phase de découragement je n’ai jamais manqué un rendez-vous. Il n’existe pas d’outil magique pour s’en sortir mais pour moi, le SPOT a fait partie d’une palette d’outils. ”

Les usagers du SPOT bénéficient d’un suivi individualisé par les accompagnateurs du SPOT © Jeremy Suyker

La consultation reste une consultation, un temps médical, mais on arrive à parler de sexualité.

Ce climat de confiance a un impact positif essentiel sur la relation patient/soignant. Cédric Etienne est médecin infectiologue en milieu hospitalier et assure une permanence au SPOT de Nice, en particulier sur la PrEP (prévention médicamenteuse du VIH). Il témoigne : “ La relation avec le patient au SPOT est très différente de celle de l’hôpital. La consultation se fait dans un bureau où on est côte à côte et non pas face à face, je ne porte pas de blouse, on se tutoie… On instaure un dialogue sans aucun critère de jugement. La consultation reste une consultation, un temps médical, mais on arrive à parler de sexualité, sujet tabou toujours très difficile pour un patient. Je vois nettement la différence par rapport à mes consultations à l’hôpital.

Mon accompagnateur connaissait la problématique de l’addiction et s’en était sorti. Avec lui, je n’ai jamais ressenti le besoin de masquer la réalité et j’avais moins cette crainte que la sincérité de ma démarche soit mise en doute.

Un bénéficiaire

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