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La médiation en santé : tisser des liens de confiance dans les territoires pour favoriser l’accès à la santé

Quelles solutions pour favoriser l’accès aux soins et la généralisation des pratiques de médiation en santé ? Retour sur notre table ronde au Festival de la Communication Santé.

À l’occasion du Festival de la Communication, la Fondation a réuni Christophe Bouillon (Association des Petites Villes de France, Fédération Hospitalière de France), Houda Merimi (Médecins du Monde), et Stéphanie Vandentorren (Santé Publique France). Interrogés par Philippe Denormandie, Délégué Général de la Fondation, ils nous ont partagé leurs regards sur les problématiques d’accès à la santé et le déploiement de la médiation en santé au cœur des territoires comme réponse concrète en faveur de l’accès à la santé de toutes et tous.

En France, la densité médicale moyenne a baissé de 18% en 10 ans pour atteindre 146,6 médecins pour 100 000 habitants en 2021 avec une aggravation des inégalités entre territoires. Le nombre de Français n’ayant pas accès à un médecin traitant serait estimé à 5,4 millions. A ces problématiques s’ajoutent les difficultés de pouvoir se rendre dans les établissements. Ces chiffres partagés par Christophe Bouillon, Maire de la commune de Barentin, Président de l’Association des Petites Villes de France et de la FHF Normandie, « montrent que la désertification médicale ne concerne plus uniquement les zones rurales et qu’un glissement s’est opéré sur l’ensemble des territoires, notamment les petites villes ». Face à ce constat, quelles solutions peuvent être mises en place pour garantir un plus juste accès à la santé aux populations les plus vulnérables ?

Christophe Bouillon – © Michel Robert | Festival de la Communication Santé

Stéphanie Vandentorren, Coordinatrice Programme Inégalités sociales et territoriales de santé chez Santé Publique France rappelle que « la santé est un droit et que la difficulté à y accéder favorise la méfiance envers les pouvoirs publics, comme l’a démontré la crise sanitaire et l’hésitation vaccinale. Mais pour rétablir cette confiance il n’est plus uniquement question d’information et d’éducation à la santé, car les liens de confiance ont été mis à mal sur l’aspect sanitaire, mais également social, alimentaire… ». Elle souligne que la médiation en santé, parce qu’elle prend en compte la personne dans son entièreté, dans la pluralité de ses vulnérabilités, apparait comme une solution efficace pour améliorer la prévention et l’accès au soin.

Cette pratique, Médecins du Monde l’éprouve sur le terrain depuis de nombreuses années, comme l’explique Houda Merimi, Responsable du pôle Qualité des pratiques en santé. L’association accompagne en France un public très éloigné du système de santé, qui a parfois renoncé à accéder aux soins. Elle appuie son action sur des médiateurs en santé dont le but est d’aller vers ces personnes dans une posture de non-jugement, de constater leurs besoins avant leur pathologie, et de les accompagner pour faire avec elles et les ramener progressivement et durablement vers le système de santé de droit commun. Un accompagnement mis en place dans différents territoires (zones rurales, urbaines, situations d’urgence, bidonvilles) pour lequel l’impact sur la restauration des liens de confiance et l’autonomisation des bénéficiaires a été largement prouvé. Cet impact a été officialisé par la loi qui reconnait depuis 2016 que la médiation en santé est un moyen de lutte contre les inégalités sociale en santé.

Houda Merimi - © Michel Robert | Festival de la Communication Santé

Au-delà de la théorie, comment généraliser la pratique de la médiation en santé?  

La question des rôles humains et, notamment, du positionnement des médiateurs est clé pour la réussite de son déploiement. Si les expérimentations sont principalement issues du monde social, le système de santé s’y intéresse de plus en plus, à commencer par la Haute Autorité de Santé qui a publié un référentiel métier pour les médiateurs en santé. Chez Médecins du Monde « des profils de médiateurs différents ont été expérimentés, certains issus du système de santé, d’autres du social ou encore des médiateurs issus de communautés similaires au public ciblé. Leur efficience est similaire mais la nécessité d’une harmonisation est partagée, avec un enjeu important de formation qualifiante et disponible dans les territoires où les inégalités en santé sont le plus souvent constatées ». Si les associations s’accordent sur l’importance de formation et de reconnaissance officielle, elles se rejoignent également sur la nécessité de garantir l’indépendance des médiateurs, notamment pour faciliter les signalements de dysfonctionnements.

La reconnaissance des compétences de ces tiers est indispensable pour définir leur place au sein d’une équipe pluridisciplinaire. Leur regard extérieur et le rôle de facilitateur pour le patient est un complément qui vient interroger les pratiques des soignants.  Une interrogation pleinement prise en compte chez Sante Publique France, comme l’explique Stéphanie Vandentorren « On interroge nos pratiques depuis le début, il nous semble aujourd’hui évident qu’il faut remettre du social dans la médecine ». Houda Merimi complète en ajoutant que « la conscience des déterminants sociaux de la santé existe très peu quand l’approche est purement curative. Il faut bousculer les pratiques en vigueur pour qu’elles intègrent davantage la personne dans sa globalité, c’est seulement ainsi que l’on assurera des parcours de soin plus efficaces ».

Stéphanie Vandentorren - © Michel Robert | Festival de la Communication Santé

Pour conclure ces échanges, les intervenants nous ont partagés les actions à mettre en place selon eux pour favoriser l’accès aux soins et la généralisation des pratiques de médiation en santé :

  • Provoquer le décloisonnement, à la fois entre le médical et le social, et surtout un décloisonnement intersectoriel, pour permettre d’agir en collectif et apporter des réponses favorisant des changements systémiques ;
  • Valoriser la formation, pour permettre la reconnaissance des postures, des savoir-faire et savoir-être ;
  • Développer la recherche, afin de prouver et assoir la légitimité de la médiation en santé et de son impact sur les publics vulnérables ;
  • Et enfin offrir un temps long aux acteurs pour qu’il puisse gagner la confiance des publics de manière durable.
Schéma de la médiation en santé en milieu rural par Médecins du monde

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