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Promo Soins : un dispositif pour répondre aux difficultés d’accès aux soins multifactorielles en Provence Verte

Dans le Var, l’association Provence Verte Solidarités-UDV a créé “Promo Soins Brignoles”, un programme socio-médical d’inclusion par la santé. Ce lieu d’accueil, de soins et d’orientation a été complété en 2018 par un volet itinérant afin de mieux couvrir le territoire rural autour de Brignoles.

La Provence Verte, en région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, est un territoire rural situé dans l’arrière-pays varois. Dans cette zone géographique, on rencontre de nombreux facteurs de frein d’accès à la santé : précarité, marginalité, difficultés administratives et absence de droits mais aussi éloignement géographique, désertification médicale et problématiques de mobilité…

L’association Provence Verte Solidarités-UDV y a créé Promo Soins, via son centre d’accueil situé sur la commune de Brignoles et son équipe itinérante, pour accompagner les personnes vulnérables, en rupture de parcours et/ou ayant des difficultés d’accès à la santé.

Isabelle Cesana, coordinatrice chez Provence Verte Solidarités-UDV, raconte la genèse du projet : “nous avons démarré avec le lieu d’accueil de Brignoles. Suite à cette expérimentation, nous avons constaté que nous touchions une trentaine de communes mais que 80 % des personnes qui passaient notre porte venaient en réalité de Brignoles même. Nous nous sommes donc dit qu’il fallait aussi nous déplacer dans les villages pour des permanences de tout premier recours.

Les locaux de Provence Verte Solidarités à Brignoles

Une équipe composée d’une assistante sociale et d’une infirmière est alors constituée. Le binôme se déplace dans l’arrière-pays à la rencontre des habitants, dans une démarche “d’aller-vers”. Aujourd’hui, les permanences se tiennent à Carcès, Rians, Saint-Julien-Le-Montagnier, Saint-Maximin et une cinquième vient de voir le jour à Barjols.

“ Pour ces personnes, la santé n’est pas la priorité, certaines ne se soignent plus depuis des années 

Pour Isabelle Cesana, les deux dispositifs ont montré leur complémentarité : “nous nous sommes rendu compte que le public était différent, avec des problématiques d’accès au soin différentes. À Brignoles, nous accompagnons beaucoup de personnes étrangères en situation de précarité, rencontrant des difficultés pour obtenir l’aide médicale d’Etat, ainsi que des personnes en marge de la société, souffrant d’addiction… Dans les villages, c’est une population un peu plus âgée, plus féminine aussi, souvent mieux couverte et bénéficiant des minima sociaux mais isolée, avec des souffrances psychologiques, et victime de l’éloignement géographique et des difficultés de mobilité”, explique Isabelle Cesana. Un constat partagé par Sabrina Beltrame, assistante de service social, aujourd’hui basée au centre de Brignoles après avoir fait partie de l’équipe itinérante : “pour ces personnes, la santé n’est pas la priorité, certaines ne se soignent plus depuis des années. Par exemple, concernant les femmes, beaucoup n’ont aucun suivi gynécologique.” Dans la région, la difficulté à consulter des spécialistes voire même des généralistes en raison de l’éloignement accentue le phénomène. Depuis Saint-Julien-Le-Montagnier, une heure de route est nécessaire pour se rendre à Brignoles consulter un spécialiste… et la plupart des médecins ne prennent pas de nouveaux patients.

“ Ce n’est pas toujours facile de rencontrer une assistante sociale… L’accueil est primordial pour mettre à l’aise, cela facilite notre accompagnement 

Parce que les difficultés sociales et médicales sont intimement liées, Provence Verte Solidarités-UDV concentre son accompagnement sur ces deux aspects. À Brignoles, cela commence par l’accueil. C’est le rôle de Sandrine Bonino : “Je suis à l’accueil avec un ou deux bénévoles, ce qui nous permet de nous relayer s’il faut par exemple accompagner une personne à la pharmacie. J’ai moi-même été bénéficiaire et je sais le poids que peut avoir le regard des autres, la difficulté à pousser la porte. J’ai été formée, par exemple pour accueillir au mieux les personnes qui présentent des addictions. Mon rôle est de rester calme, neutre, souriante, de stabiliser les états de tension et de stress quand c’est nécessaire, tout en restant souple… Et puis j’instaure le dialogue, je remplis les fiches d’arrivée en prenant les renseignements nécessaires à Sabrina pour préparer ses entretiens et gagner du temps.” Un travail d’équipe qui facilite la relation, comme l’explique Sabrina Beltrame : “grâce à cet accueil de Sandrine, une relation de confiance se crée. Ce n’est pas toujours facile de rencontrer une assistante sociale… L’accueil est primordial pour mettre à l’aise, cela facilite notre accompagnement.

Il faut avoir conscience de cette réalité : tout le monde n’a pas facilement accès au système de santé. Ce que nous faisons repose sur le travail de nos bénévoles et de notre petit réseau de professionnels de santé mais c’est un système fragile

Isabelle CESANA coordinatrice chez Provence Verte Solidarités-UDV

Il faut répondre aux problématiques avec tous les outils nécessaires, médicaux et administratifs

Sabrina Beltrame reçoit ensuite toutes celles et ceux qui passent la porte du centre – souvent grâce au bouche à oreille, orientés par le CCAS* ou d’autres associations – pour faire un point global : logement, ressources, situation administrative… Elle les dirige alors vers la permanence médicale, entame un accompagnement pour obtenir des droits lorsque c’est nécessaire et guide vers les structures adaptées.

À Brignoles, le docteur Véronique Courtin consulte une fois par semaine et peut orienter vers d’autres professionnels de santé : “Je suis endocrino-diabétologue à la retraite. Je réponds au besoin à l’instant T en consultation et nous sommes en relation avec l’hôpital de Brignoles ainsi qu’un petit réseau de spécialistes dont un dentiste de ville, un ophtalmologue, un cardiologue… C’est un travail d’équipe et de réseau avec Sabrina, Isabelle et Sandrine. Chaque cas est particulier, ce ne sont pas des consultations classiques. Nous sommes dans l’instant et il faut répondre aux problématiques avec tous les outils nécessaires, médicaux et administratifs.

Un cabinet de dentiste est installé au sein des locaux de Provence Verte Solidarités

Ce travail, dans le champ de la médiation en santé, pourrait se décrire comme un travail de facilitation qui prend ainsi de nombreuses formes, adaptées à chaque situation : faire un courrier destiné au laboratoire d’analyse pour faciliter le travail de secrétariat et l’accueil d’une personne ne parlant pas français ; faire appel à un écrivain public** pour remplir des papiers administratifs ; accompagner en voiture une personne à un rendez-vous médical loin de son domicile puis aller jusqu’à l’accueil du cabinet médical avec elle pour expliquer une situation complexe de vive voix ; rappeler un bénéficiaire pour qu’il n’oublie pas un rendez-vous médical fixé avec lui…

Tous ces cas particuliers montrent que les difficultés d’accès au soin existent bel et bien, qu’elles concernent aussi bien des personnes sans couverture santé qu’avec. Pour Isabelle Cesana, “il faut avoir conscience de cette réalité : tout le monde n’a pas facilement accès au système de santé. Ce que nous faisons repose sur le travail de nos bénévoles et de notre petit réseau de professionnels de santé mais c’est un système fragile.

L'équipe opérationnelle et le Président de la Fondation en visite chez Provence Verte Solidarités

Pourquoi nous soutenons ce projet ?

Le programme Promos Soins est emblématique de ce que la médiation en santé apporte aux personnes éloignées du système de soin, quels que soient les facteurs qui leur en freinent l’accès. En accueillant, en allant vers, en faisant avec, mais aussi et surtout en prenant en compte la situation de chacune et de chacun dans sa dimension sociale au-delà du médical, ce projet montre la nécessité de développer la médiation en santé.
*CCAS : Centre Communal d’Action Sociale
** L’écrivain public aide à la rédaction de tout document, texte, lettre, courrier administratif… pour les personnes qui maîtrisent mal ou pas du tout l’écrit.

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