Médiation en santé au service des malades et des professionnels de santé
Idées clés
Domaine d'action
- La médiation en santé
Durée du soutien
2019 - 2022
Lieux
11 hôpitaux à Paris et région parisienne
(Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne)
1 Centre Départemental de Prévention et de Santé (CDPS) en Seine-Saint-Denis
- 6200 personnes ont découvert leur séropositivité en France en 2018
- 5 médiatrices en santé en 2019
- 399 permanences en santé en 2019
- 3288 entretiens individuels en 2019
Les bénéficiaires
Pour les personnes isolées, en situation de précarité, le suivi médical est souvent un enjeu secondaire face à l’urgence des situations auxquelles elles font face (absence de ressources et de logement, isolement extrême, exil…). L’égalité de l’accès aux droits, à la prévention et aux soins, dont le cadre est bien défini en France notamment grâce à l’assurance maladie universelle, ne sont pas toujours pleinement effectifs. D’autant plus que les personnes précarisées sont souvent perdues face à la complexité de certaines démarches administratives. Ikambere accompagne plus spécifiquement les personnes touchées par VIH/Sida, le diabète, l’hypertension artérielle et l’obésité. Concernant les personnes vivant avec le VIH, même si la prise en charge médicale a connu de grandes évolutions, les malades sont toujours isolés, la peur est constante et le renoncement aux soins est fréquent.
Pour elles comme pour les personnes souffrant de diabète, d’hypertension artérielle ou d’obésité – maladies qui ont en commun d’être chroniques et intimement liées à la précarité – la prise en compte de la situation sociale des patients, et en particulier des patientes, est quasi-inexistante dans le système de santé.
Pourtant, les équipes soignantes et sociales des services hospitaliers (médecins, infirmiers, assistants sociaux) sont en demande de solutions pour humaniser la relation entre patients et professionnels de santé.
Dans ce contexte, Ikambere développe des actions de médiation en santé afin de lutter contre les exclusions et tenter de rétablir une égalité dans l’accès à la prévention et aux soins. Ces permanences sont destinées aux malades qui viennent en consultation ou sont hospitalisés dans les services de maladies infectieuses, de diabétologie et de prise en charge de l’obésité et de l’hypertension. Elles sont ouvertes à tous les malades et aux aidants qui souhaitent s’informer et échanger autour de leur pathologie et du parcours de soin. Sur le terrain, elles sont surtout fréquentées par les malades isolés, à la recherche d’écoute et de conseils dans leurs démarches (prise de rendez-vous, discussion autour du traitement…).
Le projet
Le programme de médiation en santé d’Ikambere a pour but d’améliorer la prise en charge médicale et sociale des patients et de mener des actions de sensibilisation, de prévention et d’orientation auprès des populations les plus éloignées du système de santé. Né en 2001 avec une première permanence à l’hôpital Rothschild AP-HP, il a été étendu à 13 lieux d’intervention en Ile-de-France.
La médiation entre patients et personnel médico-social lors des permanences hospitalières a de nombreux intérêts et permet notamment :
- aux patients de sortir de l’isolement, de faire face à la maladie, de mieux comprendre leur pathologie et d’adhérer aux traitements ;
- d’améliorer la prise en charge et l’accompagnement en favorisant notamment une meilleure compréhension et une meilleure relation entre le personnel soignant et les malades ;
- d’offrir un espace de parole et de convivialité aux malades, aux aidants et aux soignants (par exemple pour aborder des questions qu’ils n’osent pas poser aux médecins) ;
- de soutenir les professionnels de santé dans la prise en charge des patients ;
- de collaborer avec les services sociaux des hôpitaux afin de trouver des solutions aux problèmes sociaux ou administratifs que les patients rencontrent et qui peuvent entraver leur suivi médical et l’observance de leurs traitements (logement et hébergement, droits sociaux, régularisation…).
Concrètement, les permanences ont lieu une fois par semaine dans chaque hôpital concerné où un espace dédié est prévu pour les médiatrices de l’association. Ces dernières accueillent, autour d’une boisson chaude et d’une collation, toute personne souhaitant échanger et obtenir des informations. Les malades et leurs aidants peuvent y parler librement de la maladie et de leur quotidien, bénéficient d’actions de sensibilisation et de promotion de la santé (sur des sujets comme l’adhésion aux traitements, l’hygiène de vie, l’activité physique, la coïnfection, l’alimentation…), et les plus précaires sont orientés et conseillés pour une prise en charge sociale adaptée. À la demande du médecin ou du patient, la médiatrice peut assister aux consultations, peut également accompagner le patient chez l’assistant social de l’hôpital, ou encore, sur demande, fournir un soutien nutritionnel aux personnes hospitalisées. Enfin, l’association participe aux réunions des professionnels médico-sociaux des hôpitaux afin de rendre compte du travail effectué par les médiatrices et d’élaborer ensemble une stratégie de travail d’équipe.
Pour mesurer l’impact de son accompagnement sur la vie sociale des femmes (intégration, emploi) et leur santé (qualité de vie, observance des traitements, évitement des hospitalisations) – et en analyser le processus – Ikambere mène par ailleurs une recherche interventionnelle. Conduite sous la direction d’Annabel Desgrées du Loû, directrice de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement et directrice adjointe de l’Institut Convergence Migrations, elle permet d’enrichir la documentation sur la méthode d’accompagnement global mise en œuvre par l’association et de faciliter son éventuelle reproduction.
Les médiatrices en santé à l’hôpital donnent la parole aux sans voix, apportent un soutien moral à des patients et patientes isolés, face à une souffrance intime.
La structure
L’association Ikambere a été fondée en 1997. Son nom vient du Kinyarwanda (langue du Rwanda) et signifie “Maison Accueillante”. Ikambere est en effet d’abord un centre d’accueil de jour, situé à Saint-Denis (93), qui accompagne les femmes vulnérables touchées par le VIH/Sida.
Depuis fin 2021, grâce à l’expérience et l’expertise acquise, l’association a dupliqué son modèle pour l’appliquer à l’accompagnement des femmes en situation de précarité atteintes de diabète, d’hypertension artérielle ou d’obésité. Elle a pour cela créé un second lieu : le centre Igikali à Ivry-sur-Seine (94).
Elle a aussi ouvert en 2021 « Ikirambi, la Maison reposante » à Nesles-la-Vallée (95), à destination des femmes vivant avec une maladie chronique. Elle y propose des séjours de repos « santé, bien-être et sororité » et a pour objectifs de favoriser la libération de la parole, la pair-aidance et de promouvoir l’adoption de comportements favorables à la santé.
Les principales missions de l’association sont :
- l’éducation à la santé (prévention secondaire, éducation thérapeutique…) ;
- l’insertion sociale et professionnelle ;
- l’action auprès de la population générale pour le maintien et l’amélioration de la santé (médiation, sensibilisation, dépistage, orientation) ;
- le partage d’expertise pour améliorer les pratiques professionnelles en matière de santé.
Dans le cadre de ses actions hors les murs (permanences hospitalières, dépistage…), l’équipe accompagne plus globalement des personnes éloignées du système de soins, en situation de précarité.
L’expertise d’Ikambere en matière de médiation en santé est reconnue et diffusée auprès d’autres acteurs du secteur médico- social. L’un de ses enjeux est de développer ses actions pour créer des permanences dans un plus grand nombre d’hôpitaux.
Ce qui nous a convaincus
- Un projet d’humanisation du parcours de soin, grâce aux médiatrices en santé, véritables « traits d’union » entre les patients et les soignants, facilitatrices, douces, rassurantes, compétentes.
- Un soutien moral essentiel, chaleureux et inconditionnel, permettant une liberté de parole sans jugement, un accès à la santé, à l’information et à la prévention, tout au long du parcours de soin, et même après.
- Un savoir-faire pointu sur les femmes et le VIH, la précarité et le VIH, la santé sexuelle…
- Une capacité à transmettre son savoir et à dupliquer son modèle pour l’appliquer à des personnes souffrant d’autres maladies chroniques.