Programme Marcel Olivier d’accompagnement des personnes à la rue consommatrices d’alcool
Idées clés
Domaine d'action
- La médiation en santé
Durée du soutien
2019 - 2022
Lieux
Paris
- 105 personnes accueillies à l'Espace Marcel Olivier en 2019
- 82 personnes accompagnées en Réduction des Risques Alcool en 2019
Les bénéficiaires
En région parisienne, on estime qu’un quart des personnes sans-abri sont dépendantes à l’alcool. Consommé excessivement, l’alcool a des conséquences graves et invalidantes : troubles cognitifs, psychologiques, cardiovasculaires, neurologiques, digestifs… Or les centres d’hébergement, les accueils de jour, les structures médico-sociales, les professionnels de santé demandent à ces personnes en grande exclusion d’être sobres pour bénéficier de leur accueil et de leur accompagnement. Ce modèle dominant de l’abstinence totale est excluant pour deux raisons :
- Beaucoup de personnes ne sont pas en capacité de rester longtemps sans consommer de l’alcool, ce qui les conduit à se suralcooliser avant de rejoindre une structure pour ne pas être en manque une fois à l’intérieur ;
- Il peut avoir des répercussions sur la santé des personnes à la rue si elles sont contraintes de stopper brutalement leur consommation sans accompagnement au sevrage.
Toutes ces situations sont génératrices de violences et les sevrages insuffisamment accompagnés sont voués à l’échec avec des conséquences néfastes sur la santé et sur la vie des personnes.
Partant du principe que la personne dépendante à l’alcool a besoin d’un accompagnement sans jugement et dans un climat de confiance pour pouvoir agir sur ses pratiques de consommation (modérer ou arrêter) et améliorer sa qualité de vie, l’association « Aux Captifs, la libération » a créé un programme innovant.
Le projet
Le programme Marcel Olivier a pour objectif d’agir sur la santé des personnes en grande précarité consommatrices d’alcool en les sensibilisant aux conséquences néfastes pour leur santé et en les accompagnant dans la maîtrise de leur consommation.
Pour y parvenir, l’association a choisi de s’appuyer sur le principe de la Réduction des Risques (RDR). Cette démarche pragmatique a pour but de limiter les risques liés à la consommation de substances (licites ou illicites) sans viser comme premier objectif le sevrage et l’abstinence. Elle permet d’encourager l’usager à adopter autant que possible des comportements moins nocifs pour sa santé. Pour cela, elle prend en compte les contextes de consommation et le profil des personnes dépendantes afin de définir les stratégies les plus efficaces de réduction des risques.
Le programme Marcel Olivier s’articule autour de deux axes principaux :
- un espace thérapeutique non médicalisé, d’accueil, d’accompagnement et de sécurisation des pratiques de consommation d’alcool, baptisé Espace Marcel Olivier ;
- des actions transverses au sein des antennes des Captifs avec l’appui d’une psychologue chargée de mission en addictologie.
Ce dispositif permet d’accueillir et accompagner les individus dans leur singularité pour qu’ils appréhendent par eux-mêmes les raisons de leur addiction et les risques et dommages sur leur santé et leur quotidien. Ils parviennent ensuite à agir sur leurs pratiques de consommation d’alcool pour en réduire les effets négatifs et accéder plus facilement au droit commun et aux lieux de soins. Ceux qui le souhaitent sont ensuite accompagnés vers l’abstinence, via un parcours de soins inconditionnel.
Les bénéficiaires sont identifiés lors des tournées-rues (maraudes) ou par des structures sociales et médico-sociales partenaires (centres d’hébergement ou accueils de jour parisiens…). Ils sont reçus dans 7 accueils de jour de l’association répartis sur l’ensemble du territoire parisien ainsi que dans l’Espace Marcel Olivier situé dans le 9ème arrondissement de Paris, où ils peuvent consommer de l’alcool de façon sécurisée et accompagnée par une équipe pluridisciplinaire (intervenants sociaux, bénévoles, art thérapeute, psychologue).
In fine, le programme doit permettre de capitaliser sur le savoir-faire développé par la rédaction d’un corpus des pratiques. Il servira d’outil de formation auprès des équipes dans les antennes de l’association, de transmission de ce savoir aux autres organisations confrontées aux problématiques d’addiction, et contribuera également à faire reconnaître officiellement la plus-value de cette approche pour les personnes en situation de grande précarité.
Ici, j’arrive à mieux réguler ma consommation car je n’ai pas à m’en cacher. Je ne suis plus pressé de boire mes 3 bières le matin car je sais que je pourrai le faire à l’Espace Marcel Olivier, et au final, je ne bois qu’une bière dans la matinée.
La structure
L’association Aux Captifs, la libération vient en aide aux personnes exclues vivant de la rue ou dans la rue : personnes sans domicile fixe, personnes victimes d’exploitation sexuelle, migrants, jeunes en errance, victimes d’addictions (drogue ou alcool). Elle a pour objet : la rencontre et l’accueil de ces personnes dans des structures spécialisées de jour comme de nuit (comprenant l’hébergement) et la gestion de tous moyens visant à la sortie de l’exclusion et à la réinsertion sociale et professionnelle. Elle propose aux personnes de la rue un accompagnement global : social, sanitaire, culturel, psychologique et existentiel.
Ce qui nous a convaincus
- Un projet audacieux proposant un accompagnement sur-mesure aux personnes en situation de rue ayant des consommations d’alcool à risque, en tenant compte de la réalité du quotidien des bénéficiaires.
- Un dispositif ambitieux et structuré, appelant à l’évolution de l’accompagnement des personnes en grande précarité, pour une culture préventive de la santé et une plus grande bienveillance.